Essayons de définir ensemble et de manière non succincte un aquariophile passionné.
Que ce soit un hobby pour certains, ou une passion dévorante pour d’autres, de nombreuses communautés se créent autour des aquariums.
Tropheus sp. (Black Kiriza), lac Tanganyika
L’aquariophile se reconnaît grâce à quelques signes particuliers. L’amateur chevronné parle latin, donne des localisations GPS du bout du monde, d’où sont originaires les ancêtres de ses petits protégés, il rencontre ses semblables en semaine, dans des locaux très éclairés et chargés d’humidité, typiques de notre passion, avec des bruits de bulles et autres glouglous. Le point d’orgue de sa semaine est le weekend, quand il fait de la route pour échanger avec d’autres passionnés (ou débutant, le partage permet à la communauté de grandir), en transportant des glacières qui ne contiennent aucune trace de boissons ou de nourriture, mais qui protègent jalousement les jeunes qu’il a obtenu dans ses aquariums, dans le but de partager son travail, sa génétique. Il passe également beaucoup de temps avec moult bidons ou seaux en main, ou (avec une serpillère et un balai pour ne pas froisser son conjoint) et parcourt inlassablement les jardineries et autres animaleries des environs, pour voir si l’espèce tant désirée venait à être disponible, ou pour consulter les listings de disponibilités ultérieures. Voilà pour la description succincte du passionné.
De nos jours il existe tant de courants de pensée, de modes ou de techniques, que les passionnés peuvent faire naître les aquariums qu’ils désirent avec pour seules limites leur imagination, leurs connaissances (et leur budget bien sûr).
De nombreuses communautés existent, rassemblées autour des familles de poissons qui les passionnent ou de techniques différentes. Que ce soient les vivipares, les osphronémidés (quel nom barbare !), les cichlidés, l’aquascaping, les paludariums (etc…), en eau douce ou en eau de mer, l’aquariophilie est une passion qui permet d’exprimer les sensibilités de chacun. On trouve les fans de low-tech, qui ne sont pas radins, mais envisagent d’utiliser des méthodes naturelles, pauvres en consommation électrique et pourtant si efficaces, les fans de systèmes aquaponiques (filtration par les plantes), des fans de produits techniques ou encore les acharnés de la propreté et des conditions de laboratoire (chambre blanche combinaisons intégrales et chaussures propres !!) Je ne rentrerai pas aujourd’hui dans les spécificités de chaque branche (sauf si vous le désirez bien sûr).
Ce que je souhaite aborder aujourd’hui c’est une mouvance dans la conservation :
Les aquariums biotopes
Selon le Larousse :
Biotope nom masculin : Aire géographique de dimensions variables, souvent très petites, offrant des conditions constantes ou cycliques aux espèces constituant la biocénose. (Le biotope et sa biocénose constituent un écosystème.)
Biocénose nom féminin : Ensemble des êtres vivants qui occupent un milieu donné (le biotope), en interaction les uns avec les autres et avec ce milieu. (La biocénose forme, avec son biotope, un écosystème.)
Un très bel exemple ci-dessous : aquarium de GOODEIDAE d’Amérique centrale :
Par Tatiana Timirbulatova, River Teuchitlan, Jalisco, western Mexico
Ce sont des écosystèmes artificiels, créés pour imiter les habitats naturels de certains organismes aquatiques, spécifiques à un lieu précis. Nous pouvons définir une population stricte, dédiée à une seule espèce, ou bien créer un morceau de nature incluant les plantes et animaux que l’on peut trouver dans cette zone géographique.
Ces aquariums sont conçus pour offrir un environnement stable et sain pour les animaux, tout en offrant aux amateurs d’aquariophilie une expérience immersive et éducative.
Les aquariums biotopes sont souvent basés sur des régions géographiques spécifiques, telles que l’Amérique du sud, l’Afrique ou l’Asie. Les aquariums biotopes amazoniens, par exemple, sont conçus pour imiter les eaux douces des fleuves ou marais sud-américains, riches en matières organiques dissoutes (tanins par exemple) et pauvres en minéraux. Ils sont, par philosophie, assez semblables aux biotopes d’Asie du Sud Est. Les aquariums biotopes des grands lacs africains, quant à eux, sont conçus pour imiter les rives rocheuses, ou les fonds sablonneux des grands lacs du rift d’Afrique de l’ouest. Il y a tellement de biotopes à reproduire que nous ne pouvons pas tout lister dans cet article.
Ce mode de pensée n’est pas inféodé uniquement à l’aquariophilie d’eau douce, il s’applique également aux milieux marins: les lagons, le platier récifal, la pente externe de récif, des Caraïbes, de Bali ou d’Australie. Il peut également s’appliquer à la zone où se rejoignent ces eaux: la mangrove, avec ses palétuviers, les herbiers de phanérogames et j’en passe. Aujourd’hui, il est possible de recréer ex-situ un bout de nature disparu, ou en grand danger in-situ. Ces aquariums permettent à bon nombre d’espèces timides d’exprimer des comportements naturels qui seraient inhibés dans les conditions d’un bac trop aseptisé. On peut citer en exemple la multitude de Bettas, grandement menacés par la culture des palmiers à huile en Asie du Sud-Est.
Biotope pour Betta smaragdina, plaine inondable de Nong Bua Lamphu Province, Isan Region, Northeast Thailand
Je parle de poissons aujourd’hui mais ces aquariums s’adressent également à d’autres organismes, tels que les mollusques et les crustacés.
Biotope reproduit dans cet aquarium pour Caridina Dennerli et Tylomelania gemmifera. Parmi l’un des dix lacs les plus profonds du monde, le lac Matano sur l’île de Sulawesi, en Indonésie, est également l’un des plus uniques. Le lac Matano (en indonésien : Danau Matano), également connu sous le nom de Matana, est un lac naturel situé dans le sud de Sulawesi, en Indonésie. Avec une profondeur de 590 m, c’est le lac le plus profond d’Indonésie (classé par profondeur maximale), et le 10ème lac le plus profond du monde. L’élévation de la surface par rapport au niveau moyen de la mer n’est que de 382 m, ce qui signifie que la partie la plus profonde du lac se trouve sous le niveau de la mer. C’est l’un des deux principaux lacs (l’autre étant le lac Towuti) dans le système du lac Malili. Le lac Matano abrite de nombreuses espèces de poissons et d’autres animaux endémiques (par exemple, les crevettes Caridina (ex :dennerli) les crabes parathelphusidae et les escargots Tylomelania) ainsi que de nombreuses plantes., menacées aujourd’hui par l’introduction d’espèces exotiques envahissantes comme les tilapias, les carpes .
Pour créer un aquarium biotope, il est important de comprendre les besoins spécifiques des animaux que vous souhaitez maintenir. Pour cela, les magazines spécialisés, les sites référencés sur internet (évitons les forums sur les réseaux sociaux qui peuvent être source de bons nombres de déconvenues), la littérature et les clubs que l’on peut trouver près de chez soi vous aideront, ils vous permettront de récupérer les trucs et astuces de passionnés, de bénéficier parfois de conditions d’achat groupées (un très bon exemple: la nourriture vivante), de profiter de littérature spécialisée ainsi que de peut-être se procurer ses premiers géniteurs…
N’hésitez pas à contacter et à adhérer aux grandes associations nationales comme :
- Le killi club de France Killi Club de France – KCF
- L’association France Cichlidés Association France Cichlid
- L’association France vivipares Introduction — Association France Vivipares
- La communauté internationale des labyrinthidés Communauté Internationale pour les labyrinthidés – International Betta Splendens Club (cil-ibsc.fr)
- Les sites d’informations scientifiques comme : Search FishBase (mnhn.fr)
- Les fédérations de défense de notre passion commune comme Unicab
Pour conclure ce type d’aquariums offre aux amateurs d’aquariophilie une expérience plus immersive et éducative, car les aquariophiles peuvent en apprendre davantage sur les habitats naturels des animaux qu’ils maintiennent.
La conservation peut aussi offrir un visage attrayant et décoratif. Un morceau du Rio Xingu, une pente rocheuse du lac Tanganyika, un bout du récif de Mer Rouge à la vue de nos enfants, qui n’ont pas encore eu la chance de voyager permettra peut-être de créer des vocations, en protégeant non seulement nos animaux, mais également la beauté de leurs milieux d’origines.
Stéphane Sanchez / Pascal Perrin pour Unicab